Peu de gens auront autant contribué à l’évolution de la pêche à la mouche et à la prise de conscience environnementale qu’un petit fils de paysan valaisien, devenu familier des grands de ce monde ; Charles-César Ritz.
A vingt-six ans, en 1917, il est envoyé à New York par son père César, le fondateur du célèbre palace, pour parfaire sa formation hôtelière. Le jeune homme passe son temps libre à rafistoler des cannes à pêche en bambou refendu achetées au mont-depiété, pour les revendre à un grand magasin new yorkais devenu depuis célèbre pour ses tee-shirts et polos!
Confiné dans un bureau exigu, Ritz profite de sa tranquillité pour apprendre les rudiments du commerce avec la vente de ses cannes. Durant toutes ces années, il pourra pêcher avec son dentiste sur la Beaverkill, une superbe rivière des monts Catskill, pour vérifier ses théories sur les cannes à mouche.
De retour en France, en 1927, il ouvre à Paris un magasin de chaussures rue du faubourg Saint-Honoré. La boutique n’est qu’une façade. Derrière les cartonnages luxueux, on entend scier, limer, gratter des morceaux de cannes à pêche. L’un des modèles qu’il inventera sera fabriqué en série par l’un des plus prestigieux artisan de la côte Est, Jim Payne. Plus tard, Charles Ritz mettra au point les cannes Parabolic, qui n’ont depuis jamais démérité.
Il devient membre de lʼAnglers Club, dont, avec des personnalités d’alors. En compagnie d’amis passionnés, Ritz visite les plus belles rivières de la planète et emporte avec lui ses cannes dans le monde entier.
Le Pdt Eisenhower le remercie de lui avoir fait cadeau d’une Parabolic ! Les ombres de Bavière et dʼAutriche sont ses fidèles compagnons de jeu, tout comme les truites normandes et celles de la Test, de lʼAvon et de lʼItchen au sud de lʼAngleterre, quʼil remet très souvent à lʼeau. Les guides des grandes rivières de Scandinavie et dʼEcosse le voient souvent arpenter leurs berges, tout comme les flats de Floride ou les courants de Colombie Britannique.
Son livre, Pris sur le Vif paraît en 1953, puis en allemand en 1955, en anglais en 1959, plus tard en japonais et en italien. Il est sans cesse augmenté jusquʼen 1972, date de lʼédition définitive. Il est réédité aujourdʼhui en anglais sous le titre A Fly Fishersʼ Life.
C’est en 1958 qu’il fonde l’International Fario Club, où ses compagnons pêcheurs rencontrés au bord de lʼeau sur les cinq continents se retrouvent chaque année pour dîner à Paris dans le cadre de lʼhôtel. Ils partagent tous, sans distinction, la passion de la pêche à la mouche.
Ardent promoteur en France de la protection de la ressource en eau, Charles César Ritz défend, écologiste avant la lettre, la qualité des rivières. Il participe à la fondation de lʼassociation nationale de protection des eaux et des rivières, alors nommée TOS et dirigée par son ami Léonce de Boisset.
Il co-fonde une revue aujourdʼhui disparue, Plaisirs de la Pêche, avec entre autres Ernest Hemingway au comité éditorial. Elle reste un modèle du genre, mêlant articles techniques et tribunes sur lʼenvironnement.
En 1976, Charles César Ritz s’éteint, âgé de quatre vingt cinq ans. Il laisse une réelle empreinte dans l’art de la pêche à la mouche moderne. Son Club aujourdʼhui continue à se préoccuper de la santé des rivières en remettant chaque année un Prix qui porte le nom de son fondateur, et qui récompense une initiative individuelle ou associative en faveur de la restauration des milieux aquatiques dégradés.